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RACISME Arabe en TERRE d´ISLAM: Les enfants de Cham... le Quotidien d'un Tunisien noir

RACISME Arabe en TERRE d´ISLAM: Les enfants de Cham... le Quotidien d'un Tunisien noir

par Jolanare Jo

On ne peut pas dire qu’il était facile d’être une enfant arabe en France, ni un enfant noir. C’est peut être pour réunir nos deux misères que je me suis prise d’amitié pour une comorienne nommée Souala. C’était devenu ma meilleure copine. Je partageais tout avec elle. Elle venait de débarquer des Iles du Comores à Marseille pour vivre avec son oncle. La fenêtre de notre salon donnait sur leur balcon, et nos deux bâtiments étaient séparés par plein de maisons qui n’étaient pas trop hautes . Le soir on se faisait tout le temps des signes. Je ne sais pas si cette impression de distance était due au fait que je sois encore petite ou si nos deux immeubles étaient vraiment loin.

Nous n’avons jamais vécu en banlieue, mon père avait toujours refusé de nous loger dans cette concentration de misère sociale. On habitait au centre ville, près de Castellane.

Quand je suis rentrée en Tunisie, je n’ai plus revu Souala. Je me rappelle de ma difficulté d’intégration en Tunisie, tout le monde me traitait comme si je débarquais d’une autre planète, d’autant que mon père a choisi de me mettre à l’école publique comme tout le monde et non à l’école française des sœurs où j’aurais peut être eu moins de difficultés d’adaptation.

Je me suis prise d’amitié pour une camarade de classe, noire, qui me rappelait mon amie perdue. Cette nouvelle amie allait devenir ma meilleure amie. On a grandi ensemble et on ne s’est plus séparées depuis l’âge de neuf ans. Mais en marchant avec mon amie, j’ai pris conscience de la difficulté d’être une enfant noire, que ce soit en France ou en Tunisie. Je me rappelle la route en rentrant de l’école, les moqueries des gamins : « ka7loucha » , « zitouna » on lui jetait des pierres, on lui crachait dessus…. Je n’avais jamais vu ça en France, là bas le racisme a une élégance toute BCBG. En Tunisie c’était du racisme pur, brut, presque animal. J’étais gênée pour mon amie, je leur lançais des pierres moi aussi.

Mon père l’adorait… ayant vécu en France, il connaissait la gêne d’être considéré comme étranger. Ma grand-mère maternelle tunisoise, ne la supportait pas, elle s’étonnait que j’ai comme meilleure amie « 3abid », d’autres l’appelaient « la masakha »la femme de mon oncle, d’origine libanaise, me sortait à chaque fois des hadiths, justifiant sa haine des noirs, parlant des enfants de Cham que Dieu a maudit en le rendant noir. Je lui répondais qu’il ne fallait pas excuser son racisme par la religion. Et que Bilel, le premier muezzin était noir.

Arrivées à l’adolescence, les insultes dans la rue commençaient à changer, on la pinçait quand on passait près d’elle, les mecs lui lançaient « ka7la 3al zeb ta7la »tout le monde voulait coucher avec elle, parce qu’elle était black et par conséquent chaudasse, même mon oncle le pervers a essayé de l’approcher, mais comme je l’ai farouchement remis à sa place, il n’a plus rien tenté. Mon amie ne s’était jamais plaint… elle n’a jamais rien dit. Toute sa vie elle a masqué cette souffrance, elle a appris à vivre avec. Un jour elle s’est mariée avec le cousin de son père vivant à Djerba et est partie s’installer là-bas. Je l’ai revue hier, avec son petit garçon de six ans pour prendre un café. On s’installe. Je commande au gamin un chocolat chaud et un pot de crème chantilly. Il refuse de boire son chocolat. Sa mère insiste.

« Je ne veux pas boire du chocolat, car ça va me rendre plus noir, mais je vais manger de la chantilly pour m’éclaircir. » et il n’a mangé que de la chantilly. J’en ai eu les larmes aux yeux mais je n’ai pas insisté. Je lui ai dit qu’il était très beau, qu’il avait des yeux magnifiques et que si j’avais un garçon je voudrais qu’il lui ressemble.

On sort du café. On descend au vieux port. Je lui tiens la main, un groupe d’enfants courent devant nous et se retournent et lui lancent « ya zitouna » et s’enfuient en rigolant. Il n’y a pas plus cruel que des enfants. Je prie Dieu qu’il ne les ait pas entendus. On continue un peu plus loin, et là c’est des petites filles, qui s’arrêtent devant lui en rigolant, mais courent se cacher derrière des djellebas accrochées. Le gamin s’arrête, il ne comprend pas, il se met en face d’elles et les regarde.. Je lui demande allez on y va. Il est comme tétanisé, il ne m’écoute pas. Je le tire pour continuer notre chemin. Et j’ai une boule au ventre. Je me rappelle toutes les insultes essuyées par sa mère, depuis notre enfance, et celles qu’il reçoit encore aujourd’hui, en héritage, comme sa couleur de peau, fils de Cham.

Il n’est pas facile d’être un enfant noir et encore moins facile de vivre entouré de cons. En Tunisie ou ailleurs, quand on parle de minorités, on oublie souvent celles-là, qui sont les plus exposées depuis l'enfance. Il ne fait pas bon d'être différent ni chez les koffars, ni en terre d'Islam. La vie est injuste… j’ai la rage.

Friday, 23 March 2012

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